Alexis Deborde, fondateur de Leganov, évoque les transformations à venir pour les métiers du droit.


Comment les cabinets d’avocat peuvent innover simplement ?

Les cabinets d’avocats doivent se concentrer autour de 2 axes : la relation client et la technologie.

Historiquement le métier d’avocat était sur un piédestal : les clients venaient vers les avocats. Aujourd’hui le phénomène s’inverse et c’est de plus en plus au professionnel d’aller à la rencontre de son client. En conséquence, les avocats doivent avoir une approche plus marketing, penser des offres de services cohérentes, construire un parcours et une expérience client. Cela ne nuit en aucun cas au prestige de la profession. Elle doit seulement s’adapter — et cette transformation est déjà largement amorcée pour certains cabinets — en prenant conscience que la prestation juridique est d’abord une prestation de service qui doit répondre aux attentes de leurs clients.

Dans ce contexte, les legaltech participent à un déplacement de la valeur ajoutée et Doctrine est un très bon exemple. L’information juridique est aujourd’hui traitée à une vitesse exponentielle et le temps de recherche et d’analyse doit être valorisé autrement. La vraie valeur pour un avocat réside donc de plus en plus dans l’aide à la décision ainsi que dans l’écoute et la compréhension de son client.

Comment va évoluer la structure des cabinets d’avocat ?

J’interviens régulièrement sur ces sujets auprès de la profession dans le cadre de conférences ou de formations notamment avec Jérôme Giusti et Clarisse Berrebi associés du très précurseur cabinet d’avocats 11.100.34 avocats associés avec qui nous venons de lancer le programme Tom Lawyer (en savoir plus — ici).

La structure traditionnelle des cabinets d’avocats est aujourd’hui bousculée par trois facteurs.

D’abord économique avec l’expression de nouvelles attentes de leurs clients et la Loi Hamon et son décret d’application du 28 octobre 2014 qui permet à la profession de faire de la sollicitation personnalisée. Politique ensuite avec la loi Macron qui ouvre de très nouvelles et nombreuses perspectives d’organisation juridique des cabinets et qui offre à la profession les moyens juridiques de s’organiser pour innover (ex : ouverture à l’interprofessionnalité, développement d’activités commerciales à titre accessoire, …). Technologique enfin, avec l’arrivée d’algorithmes et d’outils permettant de mettre à la disposition de la profession une puissance de calcul inédite !

Ces facteurs ont une répercussion dans l’organisation des cabinets. Aujourd’hui il est constituée d’associés, de collaborateurs et d’assistantes, demain y seront ajoutées des fonctions commerciales ou d’ingénieries. À titre d’exemple, je suis toujours étonné de constater que très peu de cabinets aient à leur disposition des Business Developpers en charge de détecter de nouvelles opportunités, de répondre aux appels d’offre ou encore de présenter à de nouveaux prospects ou clients leurs solutions et leurs expertises.

Plus généralement, il faut penser le cabinet dans sa globalité : il s’agit d’une somme de talents pour résoudre un problème d’ordre juridique. En ce sens — et tant qu’entrepreneur aussi — j’attends beaucoup des rapprochements interprofessionnels pour ne plus avoir à expliquer à 3 ou 4 acteurs différents les enjeux et les problématiques de ma société et aussi pour bénéficier d’offres globales et cohérentes qui simplifieront certaines démarches quotidiennes.

Quelles sont les innovations nécessaires aux métiers du droit ?

À mon sens, il faut créer une expérience pour le justiciable autour d’une problématique juridique ou d’une prestation donnée. Par exemple, on pourrait très bien imaginer une prestation de service rendue par des avocats en partenariat avec des psychologues, un notaire et une solution de garde d’enfants en matière de droit de la famille ! Il s’agira parfois de partir du droit pour construire une solution plus globale qui emportera une satisfaction plus grande du justiciable et client du cabinet.

Dans ce contexte les legaltech sont des facilitateurs pour créer ces expériences ! A l’instar de Doctrine, elles permettent à la profession de gagner du temps pour se concentrer sur leur client, le développement de leur cabinet et la qualité de leurs offres.

Que pensez-vous de l’essor des legaltech ?

Être uniquement avocat ne suffit plus pour satisfaire les besoins du marché du droit. Les legaltechs bousculent les codes et créent de la valeur. Il serait dommage que la profession d’avocat n’en bénéficie pas !

Contrairement à ce que certains pensent il ne s’agit pas d’un effet de mode et la technologie appliquée au droit est l’avenir de tous les acteurs du droit. Le succès des travaux que j’ai coordonnés dans le cadre du Programme 4 Economie Numérique du Droit de l’association Open Law au sujet de la rédaction d’une “Charte éthique pour un marché du droit en ligne et de ses acteurs” signée par près de 80 acteurs le 20 janvier dernier au Congrès Eurojuris (ici), montre que les professions réglementées et les legaltech sont aujourd’hui prêtes à travailler ensemble dans l’intérêt supérieur du justiciable.

Que pensez-vous de l’initiative Doctrine.fr ?

Mettre à la disposition des avocats une puissance de calcul pour traiter plus rapidement l’information juridique et plus précisément un large fonds de jurisprudence et de doctrine comme le fait Doctrine.fr devient indispensable aux professionnels qui souhaitent gérer plus efficacement et rapidement des situations complexes pour leurs clients.

Essayez Doctrine ici.

📷 Forum parlementaire de la Legal Tech, Site du Sénat